Chaque année à la dernière semaine d’août, surgit d’un désert du Nevada une ville autogérée et éphémère ; c’est le festival Burning Man, concentré de tous les arts alternatifs sur fond de happening permanent, de rites spiritualistes, de bacchanales et autres fêtes païennes se clôturant par la mise à feu du mannequin de bois géant, le Burning Man.
Nous vous invitons ici à une petite rêverie survolant la session 2014 à travers les yeux de Trey Ratcliff.
D’une fête de plage à San Francisco et de son feu de joie rituel de solstice d’été en 1986, la célébration du Burning Man s’est rapidement étoffée au fil des années en muant en festival alternatif à part entière après que ce dernier se soit exporté pour rejoindre Black Rock City, un autre festival alternatif et radical créé en 1990 en plein désert et originellement diversement inspiré par le dadaïsme et les situationnistes.
Au fur et à mesure d’un succès uniquement assuré par le bouche à oreille, cette ville éphémère en autogestion radicale a dû composer avec les autorités en se reniant progressivement et à mesure qu’elle passait de 10.000 festivaliers à 68.000.
Comme toujours avec les festivals qui se sont perdus en chemin, l’étude de l’évolution du prix du billet est significative.
1986-1994 1995-1996 1997 1998 1999 2000-2001 2002 2003-2004 2005 2006 2007 2008 2009-2010 2011 2012 2013 |
libre 35$ 65$ 80-90$ 65-130$ 200$ 135-200$ 145-225$ 145-250$ 185-280$ 195-280$ 210-295$ 210-300$ 210-360$ 240-420$ 380$ |
Cette hausse continuelle de prix a plus globalement suivi la pente du capitalisme dans la phase de la crise systémique qui est la sienne.
Une bipolarisation de la masse du salariat, dont seul celui affilié à l’optimisation de la plus-value se retrouve en capacité de pouvoir goûter à ce caisson de décompression annuel, authentique El Dorado festif, avant de retourner début septembre vendre des assurances ou tout autre service “à la mode”… des besoins capitalistes.
Ce Burning Man, rapporté à la perspective de dépassement du capitalisme, n’ouvre finalement qu’une petite lucarne sur une minuscule part de la poésie et de la créativité que pourrait offrir le socialisme.
En l’état, un simple ballon d’oxygène délivrant l’espace de quelques heures d’un monde irrespirable et d’une existence irrémédiablement aliénée par le capitalisme tant que ce dernier ne sera abattu que sous la forme de shoots transgressifs collectifs qui ne sont là que pour rappeler que la gueule de bois, elle, se traîne sur un an.
Les Enragé-e-s